Particulièrement engagé dans la transition énergétique, le Maroc jouit d’un potentiel naturel remarquable en termes d’énergie solaire, éolienne et hydroélectrique. Il s’efforce de l’exploiter à travers des projets d’envergure comme le complexe Noor-Ouarzazate, la plus vaste centrale solaire concentrée du monde, ou le parc éolien de Taza. Le pays, qui mise aujourd’hui sur l’hydrogène vert, entend ainsi alimenter son marché intérieur, mais également répondre à la demande européenne.
Par Dounia Ben Mohamed
En matière de développement des énergies propres, le Maroc fait depuis longtemps figure de pionnier à l’échelle du continent. Pays d’accueil, en 2016, de la COP 22, il récolte aujourd’hui les fruits de son efficacité énergétique et continue à afficher des objectifs ambitieux : ainsi s’est-il engagé à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 18 % d’ici 2030 et, dans le même délai, à porter la part des énergies renouvelables à 52 % de sa capacité installée. Pour ce faire, le royaume chérifien mise en premier lieu sur l’hydraulique (secteur stratégique pour un pays qui reste dépendant de son agriculture, laquelle est soumise à rude épreuve du fait d’épisodes de sécheresse périodiques), mais également sur l’éolien, le solaire, et désormais l’hydrogène vert.
À ce titre, le Maroc ne manque pas de ressources. Avec un ensoleillement important, des vents favorables, des réserves foncières conséquentes et un emplacement stratégique proche d’importantes réserves en eau, il bénéficie de nombreux atouts pour le développement des énergies renouvelables. Dans le cadre de la Stratégie énergétique nationale du royaume, des politiques publiques favorables ont vu le jour dès 2009, avec des incitations financières pour les investissements dans le secteur des énergies propres et des partenariats internationaux permettant de bénéficier de l’expertise et des fonds nécessaires.
Résultat : en 2022, les énergies renouvelables représentaient, hors hydraulique, 16 % du mix électrique au Maroc, selon le dernier rapport de l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE). La même année, la capacité électrique installée au Maroc a atteint 11 055 mégawatts (MW), soit une hausse de 0,8 % par rapport à 2021, notamment grâce à la mise en service du parc éolien de Taza (87 MW). L’éolien y contribue à hauteur de 1553 MW (14 %), contre 831 MW pour le solaire (7,5 %). L’énergie hydroélectrique, quant à elle, a atteint 1770 MW (16 %).
« Le Maroc s’est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 18 % d’ici 2030 et à porter la part des énergies renouvelables à 52 % de sa capacité installée, dans le même délai »
Réduire la facture électrique et garantir sa souveraineté énergétique
Tout indique que ce dynamisme va se poursuivre, avec les projets éoliens de Taza, Tanger II et bien sûr Noor, la plus grande centrale solaire à concentration (CSP) au monde, qui poursuit son expansion avec Noor Midelt, Noor PVII, et Noor Atlas. À ces projets s’ajoute le parc éolien de Tarfaya, actuellement le plus grand d’Afrique, avec une capacité de 301 MW.
À travers ces mégaprojets, le Maroc vise plusieurs objectifs : réduire la facture électrique, garantir sa souveraineté énergétique, faire face aux changements climatiques, s’adapter aux enjeux du développement durable en réduisant ses émissions de gaz, mais également se positionner comme un futur exportateur d’énergie propre, en direction de l’Europe notamment. Selon une étude réalisée par le cabinet Deloitte, le pays pourrait d’ailleurs, avec l’Égypte, devenir l’un des leaders mondiaux de l’hydrogène vert, position favorisée du fait de son potentiel en la matière et de sa proximité géographique avec le Vieux Continent.
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60 milliards de dollars d’investissement dans les prochaines années
Dès février 2021, le Maroc a élaboré une feuille de route relative à l’hydrogène vert. Avec un investissement cumulé de près de 16,4 milliards d’euros, cette « Offre Maroc » pour cette ressource prouve que le pays aspire à devenir, en ce domaine, un acteur majeur en Afrique du Nord. L’institut allemand Fraunhofer, spécialisé dans la recherche en sciences appliquées, avance ainsi, dans une étude, que son objectif serait d’atteindre 160 Terawatt-heure à l’horizon 2050. S’il n’est pas le seul dans la région à vouloir se positionner comme fournisseur européen – l’Égypte et l’Algérie sont aussi sur les rangs –, le royaume chérifien a cependant pris les devants, avec une ambitieuse stratégie : selon le site spécialisé zawya.com, citant un rapport du ministère marocain de l’Economie et des Finances, quelque 60 milliards de dollars (environ 54,6 milliards d’euros) d’investissement seraient prévus pour financer, dans les prochaines années, plus de 400 projets liés à l’hydrogène vert.
Considéré comme un partenaire privilégié de l’Europe, le Maroc peut à ce titre compter sur le soutien de l’UE, qui s’est engagée à hauteur de 624 millions d’euros pour soutenir la transition du royaume vers l’hydrogène propre. L’Espagne et l’Italie font, à cet égard, office de points d’entrée européens du « futur or vert ».
« Avec un investissement cumulé de près de 16,4 milliards d’euros, cette « Offre Maroc » pour l’hydrogène vert prouve que le pays aspire à devenir, en ce domaine, un acteur majeur en Afrique du Nord »
Un leader dans le secteur de l’énergie
Parmi les nombreux projets à l’étude figurent deux interconnexions électriques et un gazoduc entre l’Espagne et le Maroc, passant par le détroit de Gibraltar. Pour sa part, le titanesque projet Xlinks, combinant solaire et éolien, constituerait une liaison directe entre le Maroc et le Royaume-Uni, capable de produire 10,5 gigawatts (GW) d’électricité à partir de panneaux solaires et de turbines éoliennes couvrant 150 000 hectares dans l’ouest du Maroc. Il transporterait ensuite 3,6 GW d’électricité directement vers le Royaume-Uni par le biais de quatre câbles sous-marins de 3800 km chacun. Il longerait les côtes espagnoles et françaises avant d’atteindre le Devon où, selon la presse britannique, il pourrait alimenter 7 millions de foyers, soit 8 % des besoins en électricité du Royaume. Outre l’Europe, l’Afrique est également visée. Déjà deuxième producteur africain dans l’éolien, le Maroc porte en effet un ambitieux projet de construction d’un gazoduc depuis le Nigéria. Celui-ci longerait la côte ouest-africaine et transporterait le gaz à travers les pays participants : Bénin, Togo, Ghana, Côte d’Ivoire, Liberia, Sierra Leone, Guinée, Guinée-Bissau, Gambie, Sénégal et Mauritanie. Il approvisionnerait également les États enclavés du Niger, du Burkina Faso et du Mali.
« Le titanesque projet Xlinks, combinant solaire et éolien, constituerait une liaison directe entre le Maroc et le Royaume-Uni »
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Autant de projets qui confortent les ambitions marocaines et font apparaître le pays comme un fournisseur crédible. C’est ce que souligne un rapport européen réalisé par Energy Portal, intitulé L’intérêt croissant pour l’énergie solaire dans les pays en développement. Soulignant les initiatives du Maroc – qui figure, avec le Kenya, parmi les meilleurs élèves du continent en matière de promotion de l’énergie solaire –, ses auteurs soulignent : « Avec ses objectifs ambitieux et son approche proactive de l’énergie propre, le Maroc est bien placé pour devenir un leader dans le secteur de l’énergie, donnant l’exemple aux autres pays de la région ».
« Déjà deuxième producteur africain dans l’éolien, le Maroc porte en effet un ambitieux projet de construction d’un gazoduc depuis le Nigéria »
KABDEL MEDIA