L’intelligence artificielle (IA) est la figure emblématique de la quatrième révolution industrielle. Dans quelle mesure cette technologie changera-t-elle le monde du travail ?
Article de Mark C. Perna pour Forbes US – traduit par Flora Lucas
Que ce soit l’éducation, le monde du travail ou le quotidien, l’IA est appelée à avoir un impact considérable, et l’on ignore encore à quel point cette technologie révolutionnera tous ces secteurs. Les réactions du public sont naturellement mitigées, allant de la peur pure et simple à l’expérimentation prudente, en passante par l’enthousiasme inconditionnel.
Alors que tous les jours, les limites de l’IA sont analysées, même ses plus fervents partisans doivent se demander si cette technologie rendra l’être humain obsolète. La question est toute simple : est-ce que l’IA va voler votre travail ?
Ce ne sera pas la première fois qu’une nouvelle technologie entraîne un changement majeur dans le monde du travail. Selon une nouvelle étude, environ six emplois sur dix à l’heure d’aujourd’hui n’existaient pas en 1940. « La plupart des emplois aux États-Unis sont de nouveaux emplois », déclare David Autor, économiste au MIT. « La plupart des emplois actuels requièrent une expertise qui n’existait pas en 1940 et qui n’était pas pertinente à l’époque. »
La société change. La technologie évolue. Le travail change. Tout cela s’est déjà produit par le passé, mais il est plus difficile de se reposer sur ses lauriers lorsque cela vous touche personnellement. La quatrième révolution industrielle est en marche et, comme dans toutes révolutions, il y a un certain malaise lorsque l’avenir est imprévisible. « Il est compréhensible qu’au milieu de telles transformations, les employés puissent ressentir de l’anxiété et de l’incertitude quant à leur rôle futur », déclare Nikhil Arora, PDG d’Epignosis.
Forbes s’est entretenu récemment avec Nikhil Arora pour aborder cette question persistante (est-ce que l’IA va voler votre travail) et la manière dont les employés et les employeurs peuvent réussir à surmonter cette révolution du monde du travail. Voici son opinion.
Ce dont l’IA est capable
Il est clair que l’IA possède des capacités étonnantes pour analyser des données et générer du contenu en cliquant simplement sur un bouton. « L’IA joue sans aucun doute un rôle crucial dans l’amélioration de l’efficacité en s’attaquant aux tâches répétitives et en effectuant des analyses de données complexes, ce qui permet d’optimiser les opérations », explique Nikhil Arora. « Elle peut également servir de catalyseur pour la créativité, en offrant des idées et des perspectives nouvelles que l’être humain pourrait négliger. »
Les applications semblent infinies : du service à la clientèle aux soins de santé en passant par le marketing et bien plus encore. Actuellement, on ne fait que probablement effleurer la surface de ses capacités. « La capacité de l’IA à analyser de grandes quantités de données permet de générer des informations prédictives, facilitant ainsi la prise de décisions éclairées dans divers secteurs », déclare Nikhil Arora.
Cependant, toute cette puissance brute présente quelques inconvénients. L’une des principales préoccupations, selon Nikhil Arora, est le risque que l’IA amplifie les biais présents dans les données sur lesquelles elle est entraînée, ce qui conduit à des résultats discriminatoires. « Un recours excessif à l’IA sans supervision humaine appropriée peut entraîner des erreurs et des négligences qui auraient pu être détectées autrement », affirme le PDG d’Epignosis.
Ce dont l’IA est incapable
Aussi impressionnante que soit l’IA à l’heure actuelle, et même si elle continuera à s’améliorer, elle ne sera jamais humaine. « L’IA ne peut pas reproduire l’ingéniosité et l’innovation inhérentes à certaines tâches humaines, en particulier celles qui requièrent de la créativité et de l’originalité », explique Nikhil Arora.
C’est la raison pour laquelle les compétences non techniques (ou les compétences professionnelles) prennent de la valeur à mesure que l’IA et l’automatisation sont utilisées pour des tâches plus routinières. « Il ne s’agit pas d’opposer les compétences non techniques aux compétences techniques, mais plutôt de reconnaître comment celles-ci se complètent pour favoriser la réussite. » Plus que jamais, les travailleurs ont besoin des deux.
Nikhil Arora se réfère à des données récentes qui montrent que 57 % des responsables RH prévoient une augmentation de l’importance des compétences non techniques à mesure que l’adoption de l’IA se répand. « En outre, 43 % d’entre eux prévoient l’apparition d’un déficit potentiel de compétences en raison de cette évolution technologique », déclare le PDG d’Epignosis. « Il est clair que parallèlement à l’adoption de l’IA, il y a un besoin urgent d’investir dans des projets de perfectionnement et de reconversion, avec plus de six responsables RH sur dix soulignant l’importance de ces projets à la lumière de ces changements. »
Diriger dans un monde piloté par l’IA
La façon dont vos employés abordent l’IA est étroitement liée à la façon dont cette technologie est accueillie par les dirigeants de votre entreprise. « Les dirigeants jouent un rôle essentiel dans la préparation de leur personnel à l’imminence d’un paysage dominé par l’IA », affirme Nikhil Arora. « Au total, 45 % des responsables RH pensent que les entreprises devraient avoir une politique claire en matière d’IA pour réussir la transition vers un avenir dominé par l’IA. »
Nikhil Arora préconise que les employeurs offrent une formation à l’IA à tous les employés. « Indépendamment du fait que les employés travaillent dans un rôle technique ou non technique, la maîtrise de l’IA sera la nouvelle compétence indispensable pour tous les employés », déclare-t-il. « Il est également recommandé aux employeurs de se rapprocher de leurs employés, d’écouter leurs préoccupations et de mieux comprendre leurs craintes, leurs besoins et leurs défis. »
Nikhil Arora indique trois mesures que les dirigeants peuvent prendre pour créer une initiative de perfectionnement efficace autour de l’IA :
- Sensibiliser les employés et identifier leurs lacunes en matière de compétences.
- Rechercher de manière proactive des ressources et des opportunités pour former les individus aux technologies de l’IA et à leurs implications sur le lieu de travail.
- Doter les employés des connaissances et de la compréhension nécessaires pour s’adapter à l’évolution de l’environnement et s’y épanouir.
En même temps, avec toute cette attention portée aux compétences en matière d’IA, il pourrait être facile de perdre de vue ce que Nikhil Arora appelle les « compétences centrées sur l’humain » (par exemple, la créativité, le leadership, la pensée critique et l’intelligence émotionnelle). « Ce sont des qualités indispensables qui permettront aux individus d’exceller dans un monde régi par l’IA », explique-t-il. « Par conséquent, les dirigeants doivent mettre l’accent sur le développement de ces compétences parallèlement aux compétences techniques, afin de garantir une main-d’œuvre bien équilibrée capable de naviguer dans les complexités de l’ère de l’IA avec confiance et efficacité. »
Survivre et prospérer durant la quatrième révolution industrielle
Nikhil Arora estime qu’il est essentiel de reconnaître que l’IA offre des possibilités d’innovation et de croissance. « En misant sur l’éducation et la formation aux compétences liées à l’IA, les individus peuvent se positionner pour réussir dans un avenir dominé par l’IA, en assurant leur pertinence et leur résilience sur un marché de l’emploi en constante évolution. »
Parallèlement au développement de vos compétences en matière d’IA, il est également important de ne pas négliger vos compétences professionnelles. « La résolution de problèmes, la créativité et la capacité d’apprentissage figurent parmi les trois compétences les plus demandées mises en évidence par des données récentes », précise Nikhil Arora.
Enfin, personne ne doit paniquer à l’idée d’être remplacé par l’IA. « Bien que l’IA suscite des craintes, les prévisions suggèrent que l’IA ne remplacera pas entièrement les rôles dans le monde du travail, mais les remodèlera, en incorporant de nouvelles responsabilités telles que l’interaction avec les outils d’IA », explique Nikhil Arora.
Pour les employés, la question ne devrait pas être « L’IA va-t-elle prendre mon travail ? », mais plutôt « Comment l’IA peut-elle devenir mon nouveau collègue de travail ? ».
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