Depuis le coup d’État militaire qui a eu lieu à Niamey le 23 juillet, de nombreux commentaires ont été faits sur l’importance stratégique de ce pays pour l’ancienne puissance coloniale. La France tire du Niger une part importante de l’uranium dont elle a tant besoin et elle est également présente militairement dans ce pays du Sahel. Les troubles politiques à Niamey intéressent sans aucun doute Paris.
Peu après la prise du pouvoir par les militaires, une rumeur s’est répandue selon laquelle le Niger avait interdit les exportations d’uranium vers la France, ce qui s’est avéré faux – l’idée a toutefois pu être lancée. Cette allégation impliquerait également que le Niger aurait refusé à la France sa source la plus prisée de minerai d’uranium. Considérons un instant l’importance de cette ressource pour le gouvernement de l’Élysée et, plus largement, pour les besoins énergétiques des Français.
Le Niger contribue à hauteur d’environ 5 % à l’offre mondiale, selon les données de 2022 de l’Association nucléaire mondiale (ANM) : il a produit 2 020 tonnes d’uranium. Il a eu beaucoup de difficultés à se développer dans le secteur en raison des coûts élevés liés aux mauvaises infrastructures et à l’insécurité. Les principaux producteurs sont le Kazakhstan (43 %), le Canada (15 %), la Namibie (11 %) et l’Australie (8 %). Néanmoins, l’uranium du Niger est d’une importance stratégique pour la France, dont il est le 7ème producteur mondial.
Selon Le Monde, en 2022, la grande puissance européenne s’est approvisionnée en uranium auprès du Niger à hauteur de 20,2 %, soit 1 440 tonnes sur 7 131. Cela fait du pays africain le deuxième fournisseur, après le Kazakhstan et avant l’Ouzbékistan. En outre, Orano, société contrôlée par l’État français, possède trois mines dans le pays sahélien, bien qu’une seule soit en activité. Le Niger pourrait également être la source d’un cinquième des importations d’uranium pour l’ensemble de l’UE.
Par ailleurs, la France tire 70 % de son électricité de l’énergie nucléaire. Alors que d’autres pays, comme l’Allemagne, se montrent plus sévères, Paris considère le nucléaire comme une source d’énergie rentable et durable. Il est prévu que le nucléaire se développe parallèlement à la production d’énergie renouvelable, et non qu’il se réduise. De ce point de vue, l’uranium nigérien est important à la fois pour l’économie actuelle de la France et pour sa croissance future.
Selon la Banque mondiale, en 2019, toutes les exportations d’uranium du Niger étaient exclusivement destinées à la France. L’ancienne colonie n’est donc pas seulement importante en tant que fournisseur, mais aussi parce qu’elle est à bien des égards contrôlée par un monopole. Concrètement, il s’agit d’une industrie française sur le sol nigérien.
Le Niger est confronté à un dilemme similaire à celui de nombreux producteurs de matières premières riches en ressources mais économiquement pauvres. Il n’a pas d’industrie nationale et doit compter sur des capitaux étrangers pour l’exploitation minière et l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, ce qui est hors de sa portée. Tant que cette situation persistera, Niamey devra chercher à établir des relations étroites avec une puissance étrangère dans le secteur. Après le coup d’État militaire, la France va-t-elle être remplacée ? Ou allons-nous assister à la naissance d’une dynamique différente avec plus d’acteurs impliqués, donnant peut-être un rôle plus important aux Nigériens ?
Article traduit de Forbes US – Auteur : Elias Ferrer Breda
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