Nicolas Mahut, quand a émergé dans votre esprit l’idée de devenir consultant à la TV ?
Nicolas Mahut : Assez récemment, en fait. Il y a eu à la fois le départ à de Jean-Paul Loth (qui a pris sa retraite à l’issue du tournoi de tennis olympique, ndlr) et en même temps ma blessure (une hernie discale, ndlr), qui me rend indisponible pour une durée indéterminée. Quand j’ai su que je n’allais pas pouvoir disputer l’US Open, j’ai appelé Frédéric Verdier pour lui demander si Eurosport avait besoin de consultants pour la quinzaine. Ça c’est fait comme ça, et je vais donc tenter de relever ce challenge.
Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce challenge, justement ?
N.M. : C’est de voir un autre aspect du sport, du jeu. De me mettre un petit peu en danger aussi, parce que j’estime qu’être consultant est un métier difficile. Sur certains matches que je regardais, il m’est déjà arrivé de couper le son parce que je n’aimais pas les commentaires. J’estime que c’est un exercice compliqué, mais j’ai envie de l’essayer. Je ne sais pas si je vais être bon, si je vais aimer ça, ou si la chaîne et les téléspectateurs vont m’apprécier. Mais en tout cas, c’était pour moi l’occasion de faire un test et de voir si à l’avenir, c’était quelque chose qui pouvait m’intéresser.
Quel doit être le rôle d’un consultant, selon vous ?
N.M. : Moi, je pars du principe que le consultant est là pour apporter un regard sur le jeu que le téléspectateur ne pourrait pas avoir en étant simplement pratiquant en tennis loisir. Il doit analyser ce qu’il a sous les yeux, tout en sachant être indulgent avec les joueurs. Car il ne faut pas oublier qu’il peut y avoir des émotions, des conditions climatiques délicates, des jours où on est moins bien… Tout ça, les gens ne s’en rendent pas forcément compte. Enfin, on doit dégager de l’intensité et de l’envie, pour inciter à regarder le match que l’on commente.
Vous êtes encore en activité, cela peut-il vous aider à apporter votre plus-value, à vous démarquer ?
N.M. : Je pense que le fait d’être encore en activité, c’est à la fois un avantage et un inconvénient. La plupart des joueurs, soit je les ai joués, soit je les ai côtoyés dans le vestiaire ou sur le circuit. Ça, c’est un avantage. L’inconvénient, c’est qu’il peut y avoir un attachement et être un peu trop dans l’empathie pour réellement dire ce qu’il se passe. Pourtant, si le match n’est pas bon, c’est aussi le rôle du consultant de dire pourquoi il n’est pas bon. Après, sur le style, j’imagine qu’en deux ou trois jours, ça va être difficile pour moi de le trouver. Mais je compte sur Fred Verdier, que j’entends aux commentaires depuis plus de 20 ans, pour m’aiguiller et m’aider à trouver mes repères.
Y a-t-il un match que vous auriez absolument aimé commenter ?
N.M. : C’est une très bonne question (il réfléchit). Je pense que j’aurais adoré commenter la finale de Wimbledon 2008. Pour moi, c’est l’une des plus belles finales de Grand Chelem, avec des rebondissements exceptionnels (Rafael Nadal avait battu Roger Federer 6-4, 6-4, 6-7, 6-7, 9-7, ndlr). C’est un match qui m’a énormément marqué. Plus récemment, je pense que j’aurais de toute façon choisi un des matches de Rafa, parce que j’en suis un grand fan.
Pour revenir sur l’actualité, quel regard portez-vous sur la tournée nord-américaine et l’US Open qui se profile ?
N.M. : Quand on voit la victoire d’Alexei Popyrin au Masters 1000 de Montréal, c’est à la fois étonnant parce qu’on ne l’attendait pas à ce niveau-là, mais en même temps, ce n’est pas aussi surprenant. Parce qu’il y a eu un enchaînement pratiquement impossible à tenir pour les top joueurs avec Roland-Garros, la tournée sur gazon qui engendre un changement de surface très exigeant, puis les Jeux Olympiques et, la semaine qui a suivi, le début de la tournée nord-américaine au Canada. D’ailleurs, on a vu Taylor Fritz et Tommy Paul avoir du mal, parce qu’ils sont allés assez loin en double aux Jeux. On aussi vu un Daniil Medvedev qui n’est pas du tout dans ses standards, en perdant deux fois assez tôt. C’est pourquoi il y a un coup à jouer pour les joueurs un petit peu en dessous, comme Popyrin a réussi à le faire.
Concernant l’US Open, il faut voir comment Alcaraz va gérer sa reprise après sa finale olympique. Novak, on ne sait pas dans quel état de forme et surtout dans quel état de motivation il va arriver. Donc ça va être intéressant de voir ce qu’il va se passer entre ceux qui ont réussi à récupérer, à digérer un petit peu cet été bien chargé, et puis ceux qui vont arriver avec de la confiance. En tout cas, j’ai le sentiment que c’est assez ouvert et qu’il y a un petit peu moins de certitudes que sur les années précédentes.
KABDEL MEDIA